Babylon : quand la culture française enivre le cinéma d'Hollywood

Sorti au cinéma le 18 janvier dernier, "Babylon", le dernier film réalisé par Damien Chazelle, enregistre déjà près d'un million d'entrées en France. Quatrième long métrage du réalisateur franco-américain, le film attire en masse les spectateurs de l'hexagone qui lui réservent un bien meilleur accueil qu'aux Etats-Unis, où il a connu un échec que l’on pourrait qualifier de cuisant.

[Alerte Spoiler] Fin des années 1920. Los Angeles, Hollywood. Dès les premières minutes du film, le ton est donné. Damien Chazelle nous plonge, avec enchantement, dans son univers déjanté. N'en déplaise aux critiques mitigées de cette tragédie comique de trois heures et neuf minutes qui retrace l'apogée du cinéma muet et sa chute lorsque Hollywood a intégré le son, le réalisateur a le mérite de capter la montée émotionnelle autant que l'érotisme transcendant des années folles et du Hollywood d'antan. A travers cette ère de débauche durant laquelle le spectateur est embarqué de force, on suit l'ascension et le déclin de la star Nellie LaRoy, incarnée par la sublime Margot Robbie, de l'acteur tout-puissant Jack Conrad (Brad Bitt), du jeune et talentueux réalisateur Manny Torres (Diego Calva), du trompettiste virtuose Sidney Palmer (Jovan Adepo) et, enfin, de la sensuelle Lady Fay Zhu (Li Jun Li).

Du début à la fin, il en est un qui incarne lui aussi un rôle majeur pour illustrer toute cette décadence : l'alcool. Mais pas n'importe quel alcool, l'alcool français. Champagne, Cognac, Lillet, Absinthe… s'invitent à chaque instant du film et enivrent le cinéma d'Hollywood.

Silence, moteur, ça tourne, action, Gaspard pointe sa caméra sur les spécialités françaises mises à l’honneur du dernier film de Damien Chazelle.

Le champagne : un personnage à part entière du film Babylon

Dès le début du film, le réalisateur franco-américain Damien Chazelle propose une ouverture gargantuesque, sur fond d'une fête orgiaque digne d'une bacchanale. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cette première séquence, qui se tient dans le manoir du producteur Don Wallach (incarné par l'acteur Jeff Garlin), fait la part belle au champagne qui y coule à flots ! De la tombée de la nuit au lever du jour, le vin effervescent est partout. Chaque plan ou presque met la bulle française à l'honneur. A commencer par la scène où l’un des convives demande à Manny Torres de lui ramener plus de champagne (« get more king bubbly »). Une scène qui précède un gros plan sur une immense pyramide de coupes remplies à ras-bord. Un peu plus tard, on aperçoit même une bouteille de Champagne voler en éclat. Puis, c’est au tour de Brad Pitt de faire son entrée où, tout juste après s’être installé à sa table, il explique à la serveuse, Jen, que deux bouteilles de Champagne ne suffisent pas et qu’il lui en faut huit, ainsi que plusieurs cocktails dont trois French 75's, un cocktail classique et vintage mis au point au début des années 20 par un barman qui jugeait que son effet était comparable au canon français de 75mm. Si l'on ne voit malheureusement pas la préparation de cette boisson à l'écran, la recette traditionnelle du French 75 se compose de Champagne, de gin, de jus de citron jaune et de sirop de sucre simple. A consommer avec modération bien-sûr.

Particulièrement mise en avant durant cette première séquence, la bulle française pétille tout au long du film de Damien Chazelle, qui ne manque aucune occasion de lui faire une place à l’écran.

"Champagne", c'est d'ailleurs aussi le titre de l'un des morceaux de la géniale bande originale que propose le compositeur et ami de Damien Chazelle, Justin Hurwitz, lequel vient d’ailleurs de remporter son 4ème Golden Globe pour le film Babylon.

Notons par ailleurs que lors de l'une des projections du film Babylon aux Etats-Unis, l'acteur Tobey Maguire a distribué des bouteilles de champagne au public avant la projection, c'est dire si le vin effervescent français joue un rôle important dans le film de Damien Chazelle !

Pas de placement de produit en revanche pour le champagne français, le spectateur n’a pas d’indication sur la maison qui fournit la bulle au film Babylon.

Les autres réjouissances françaises à l'affiche du film Babylon

Le champagne n'est pas la seule spécialité française à tenir un beau rôle dans Babylon. A ses côtés, cognac, triple sec, lillet et absinthe s’invitent aussi dans le cinéma de Damien Chazelle. D’ailleurs, tous ces ‘‘pousse-au-crime’’ apparaissent dès la scène où Brad Pitt commande plusieurs cocktails à la serveuse dont un orange blossom with brandy (un cocktail emblématique de l’ère de la prohibition, durant laquelle le cognac était tout simplement mélangé avec du jus d’orange) ainsi qu’un Corpse Reviver, un cocktail composé de gin, de citron, de triple sec, de lillet et d’un trait d’absinthe.

A plusieurs reprises dans le film, le cognac revient à l’écran, y compris entre les mains de Tobey Maguire qui, dans le rôle d’un personnage aussi dépravé qu’obscur, aime le « couper » avec de l’éther. On vous avait prévenu que le film était déjanté… Et encore, on n’aborde pas toutes les autres ‘‘réjouissances addictives’’ qui ponctuent chaque minute ou presque du film.

Certes, au bout de 3h, on ressort (un peu) avec la gueule de bois. Pour autant, Babylon a le mérite de mettre à l’honneur quelques-unes de nos spécialités françaises, lesquelles apportent ce supplément d'âme aux années folles que décrit admirablement Damien Chazelle.